jeudi 10 février 2011

La Commune, Peter Watkins (2000)


Documentaire, film, débat télévisé, reportage, exercice de style foncièrement subversif, cinéma télévisuel, télévision sur grand écran, Présent en noir et blanc, Passé haut en couleur, acteurs en civil, sans-papiers citoyens, chômeurs ayant droit à la parole, la Commune, la Cause Commune… idées en 3D sur écran plat.


Pendant près de 6 heures, « La Commune » se démarque par son aspect universel, mélangeant les époques, les luttes et les identités des comédiens.

En effet, grâce à un montage intelligent et novateur, Peter Watkins donne une dimension actuelle à l’Histoire de la Commune, fait parler les Hommes en même temps que les comédiens, accole de manière judicieuse des discours joués et des grognes personnelles. Ainsi, tout au long de ce périple sans âge, le spectateur devient un acteur potentiel, un interlocuteur ou un compagnon de route. Sans ressentir la moindre discontinuité, on oscille entre fiction et réalité, c’est dire si la Commune était en avance sur son temps quant aux idées qu’elle véhiculait. Ou peut-être est-ce le cours des choses qui n’évolue que trop lentement ?


Un des points forts de « La Commune » réside dans l'emploi de comédiens non professionnels qui portent un discours plus qu’ils ne jouent. L’Homme/acteur est donc ici le support de l’oppression, une machine usée par un système totalement illogique. Ces comédiens, ils sont black, blanc et beurs, les trois couleurs des communards mais aussi de notre société d’aujourd’hui.


Au fil du film, les discours des Hommes ressemblent de plus en plus aux discours joués et la Commune devient une actualité, une lutte à achever, la plus grande avancée en terme de droits sociaux et d’organisation égalitaire ( interdiction du travail de nuit pour les boulangers, statut de la Femme égal à celui de l’Homme, créations de coopératives pour chaque corps de métier, démocratie directe, entraide intergénérationnelle…).


Enfin , « La Commune » est une critique sévère des médias: Les médias au service du pouvoir ( médias de l’opposition), les médias voyeuristes (qui filment la Révolution parce qu’elle revêt un caractère spectaculaire) ou encore les médias « subversifs » (qui annihilent toute construction en employant un vocabulaire cru et violent mais vide de sens).


« La Commune » est à voir absolument. Pas besoin d’être communiste, anarchiste ou capitaliste pour pouvoir y déceler une richesse incroyable en terme de sentiments humains, de connaissances et d’ouverture d’esprit. La Commune de 1871 est allée au-delà de toute liberté connue. Bien que très courte, elle réfléchissait déjà à la vie en dehors du travail, « à être quelqu’un » plutôt qu’ « à faire quelque chose ». Elle voulait créer une identité individuelle et non professionnelle, désirait aménager du temps pour se construire en réduisant le temps de travail, bref l’opposé de la société de plus en plus matérialiste dans laquelle nous vivons.


La Commune doit être apprise à l’école afin que l’on soit sensiblisé dès le plus jeune âge à la construction de soi, indépendamment de toute optique professionnelle.