samedi 30 juin 2012

Cosmopolis, David Cronenberg (2012)




« Cosmopolis » est un film atypique et désespéré. L'esthétique y est parfaite et l'on est loin des premiers films de Cronenberg avec leurs images délavées et fades. Dans son dernier film, le réalisateur du « Festin Nu » tente d'explorer le monde obscur de la finance.

La plupart du film se déroule dans une limousine blanche insonorisée, cocon matériel et lieu de vie du golden boy Eric Packer. Dans ce palace mobile, il baise, boit, se fait ausculter par un médecin, invite ses amis, discute philosophie... le tout avec un visage placide et stoïque.
Lorsqu'il quitte sa limousine, Eric se retrouve dans des endroits quasi désertiques et très classiques (hôtel, bar-restaurant, terrain de basket, coiffeur,...).

Quelques phrases suffisent pour décrire ce trip halluciné mais réel. En revanche, il faudrait beaucoup plus de temps pour décrire ce qui est montré entre les images. Les dialogues sont omniprésents et ce sont eux qui portent le film. « Le Temps est une denrée qui se raréfie » lance Eric à sa femme, accoudé au comptoir d'un bar. « Nous devons contrôler le futur pour remplir le présent » lance l'espèce de professeure de philosophie. En effet, le Temps est ici au cœur du film. Ça grouille d'informations en temps réel, données par Torval, le garde du corps d'Eric. Le jeune golden boy vit en avance sur le monde et se retourne sur son présent pour observer ce qu'il est. Il y a très peu voire pas du tout d'évocation du passé de la part d'Eric. Ce qu'il faut pour survivre au monde de la finance, c'est vivre perpétuellement dans la transition car l'invention périme à sa naissance.

« Le mot ordinateur n'existe déjà plus » affirme Eric. Le monde entre dans une ère spirituelle, tout les termes changent et le matériel disparaît peu à peu. « Cosmopolis » est une succession de mots mis en image expliquant la fin d'un capitalisme matériel qui a engendré la mis en commun d'un individualisme grandissant. Ce film réussi à créer du neuf à partir de discours ressassés depuis des décennies. Mais le discours n'est pas non plus anti-captialiste car le réalisateur dénonce l'inutilité de certaines luttes consistant à crier au scandale ou à entarter les coupables.

La scène finale est peut-être le point faible du film de par sa longueur. On décroche un peu au bout d'un moment et on est quelque peu déçu sur le moment avant de se dire à nouveau qu'on vient de voir un chef-d 'œuvre en sortant de la salle.
« Cosmopolis » est un film très dense qui nécessite un second visionnage pour avoir toutes les cartes en main et pouvoir comprendre un peu mieux cette magnifique peinture cinématographique.