dimanche 4 juillet 2010

Tony Gatlif ou la métaphore de l'oiseau sans pattes


Réalisateur talentueux et amoureux de la musique nomade, Tony gatlif nous offre dans chacun de ses films un véritable voyage à la rencontre de peuples humainement musicaux. Dans "Gadjo Dilo", son film le plus poignant, il parvient à lier musique et histoire d'un peuple, si bien que musiques, chansons ou danses se posent ici en véritable témoignage. Car la musique, trop souvent perçue comme à côté de l'Etre Humain, n'est en fait qu'un organe intrinsèque à l'homme, indissociable de son histoire et de son caractère, aussi important que la Parole. Et cela Tony Gatlif le montre à merveille, il filme les expressions des personnages lorsqu'ils chantent ou dansent, dans les moments tragiques comme dans les brefs instants de joie et toujours avec curiosité et respect.

Son cinéma met également à la portée de tous une culture trop peu connue du grand public sans tomber dans la simple vulgarité. Plutôt que de faire des concessions dans la nature même de ses films, il met à contribution des acteurs célèbres comme Romain Duris, même si par moment l'acteur paraît fade face aux personnages authentiques de ses films.

A l'instar d'Emir Kusturica, Gatlif filme et fait parler la musique, peut-être avec moins d'humour et plus de réalisme. Documentaire, film musical ou film d'auteur? Difficile d'en définir le style exact. Peu importe au final. Adultes comme enfants se retrouvent unis par une musique qui gomme les différences d'âges, comme un langage commun composé par un vocabulaire naturel et inné.

Mais Tony Gatlif c'est aussi le chantre des nomades et des personnages bousillés par la vie. Dans "Gaspard et Robinson", il dresse le portrait de deux amis complèment détruits intérieurement, sédentaires mais nomades à jamais dans leurs têtes. "Transylvania", "Exils" et surtout "Je suis né d'un cygogne" viennent complèter ce tableau de l'errance. La métaphore de "l'oiseau sans pattes qui se pose pour mourir" évoquée par Wong-Kar-Wai est également valable pour le réalisateur de "Gadjo Dilo".

Au final, les films de Gatlif doivent être appréhendés comme une invitation au voyage et une ouverture sur l'autre dans ce qu'il a de plus foncier. Avec "Latcho Drom", son projet le plus ambitieux, il s'est initié au documentaire artistique, toujours en montrant l'histoire de la musique à travers celle de son peuple.

10 commentaires:

Chinaski a dit…

J'ai bien aimé Latchodrom, mais Gadjo Dilo est tout de même sacrément ridicule, entre Romain Duris et ses grimaces mono-neurones, la gitane dont il tombe évidemment amoureux (on est proche des clichés cette fois) ou les poulets qui planent au-dessus des maisons en flammes et qui m'ont au moins procuré une légère crise de fou rire.

Amicalement, Chinaski.

ravachol a dit…

Et l'enterrement avec le père qui danse sur la tombe complètement saoul? la voix du nain avec son accordéon? Les portraits de gitanes atypiques de crudité que l'on voit tout au long du film? J'avoue que romain Duris est un peu fade dans ce film, mais le reste est tellement bon...

Latcho drom m'a moyennement plu par contre... trop ambitieux et trop lent.

Mais il n'y a vraiment aucune atmosphère dans Gadjo Dilo?? Je peine à le croire...

Chinaski a dit…

Disons que quand l'acteur principal est juste insupportable, le scénario bateau et certaines scènes ridicules, j'ai du mal à rentrer dans le film pour apprécier d'autres scènes qui sont peut-être bien, mais qui ne m'ont pas marqué en tout cas.
Latcho drom dégageait de belles images et de belles musiques par contre.

ravachol a dit…

Pour arriver à la scène avec les poules qui volent au-dessus de la maison qui crame, il faut se coltiner: l'acteur principal insupportable, le scènario bateau, les scènes ridicules... si en plus tu es passé à côté des bonnes scènes... tu avez donc rien à foutre à ce point là pour te faire chier pendant 1h30? où peut-être le film était un brin intéressant derrière toute cette avalanche de défauts.

ravachol a dit…

En ce qui concerne le film en lui-même, je ne pense pas que Romain Duris soit une erreur. Certes, il est mauvais, délavé, fade, sans charisme, trop banal... je suis d'accord avec toi. Mais au final, cela permet de confronter deux cultures musicales et festives. Celle de la France, difficilement palpable, nostalgique quand à sa véritable identité, et celle des pays de l'Est, plus ancrée dans le peuple, plus quotidienne, moins prétentieuse.

Bien sûr ça fait un peu chier d'être représenté par un acteur qui trouve plus sa place dans les films de Klapisch, mais serions-nous réellement différents à sa place? Comment définis-tu la musique populaire française? Y trouves-tu un terreau fertile donnant lieu à un vrai partage intergénérationnelle? Sorti du bal musette et de l'accordéon, la chanson populaire française n'a au final que plagier les styles des autres pays. Certains perpétuent ce style nostalgique d'une époque qui paraissait poétique et humaine ( bien que tous les vices y étaient au moins autant présents qu'aujourd'hui), les autres sont allés puiser dans les autres pays.

Je ne m'y connais pas assez, mais il y a certainement tous ces styles dans les pays de l'Est, peut-être moins développés que chez nous. Mais cette véritable identité musicale, qui je pense n'est pas un cliché comme le béret et la baguette de pain, prend valeur de parole. Enterrements, mariages, naissances, fête, desespoir, famille, tradition... cette musique accompagne chaque période de la vie. C'est ce qui ressort de "Gadjo Dilo".

A l'heure où un gars de l'Est est assimilé à un laveur de vitre, à un gosse mutilé pour faciliter la mendicité, à un pauvre qu'il faut renvoyer chez lui, ce genre de film ne peut être que bon, car il met en valeur la richesse de ce peuple trop sous-estimé. Et ce n'est pas parce qu'un Romain Duris, "avec ses grimaces mono-neurones", vient nous rappeler qu'on se trouve dans un film français, qu'il faut chercher à tout prix les quelques clichés du film. C'est un peu comme si à Saint-Pierre, un musicien d'un soir nous régalait par son talent et que l'on ne s'intéressait qu'au blaireau lambda à côté, parce qu'il fait partie du même décor.

Le cinéma c'est aussi ça, faire des concessions, faire un tri au sein même du film, car même la moindre scène réussie, aussi courte soit-elle, peut nous rendre indulgent face à la merde qui l'entoure. C'est ce qu'a réussit Gatlif pour moi.

Enfin bref, je sais pas pourquoi j'écris tout ça. "Gadjo Dilo" m'a ému par ses musiques, ses personnages atypiques, son atmosphère entrecoupée de Romains Duris. Peut-être suis-je un novice qui découvrira plus tard d'autres films dans le genre qui me feront mentir.

ravachol a dit…

En ce qui concerne le film en lui-même, je ne pense pas que Romain Duris soit une erreur. Certes, il est mauvais, délavé, fade, sans charisme, trop banal... je suis d'accord avec toi. Mais au final, cela permet de confronter deux cultures musicales et festives. Celle de la France, difficilement palpable, nostalgique quand à sa véritable identité, et celle des pays de l'Est, plus ancrée dans le peuple, plus quotidienne, moins prétentieuse.

Bien sûr ça fait un peu chier d'être représenté par un acteur qui trouve plus sa place dans les films de Klapisch, mais serions-nous réellement différents à sa place? Comment définis-tu la musique populaire française? Y trouves-tu un terreau fertile donnant lieu à un vrai partage intergénérationnelle? Sorti du bal musette et de l'accordéon, la chanson populaire française n'a au final que plagier les styles des autres pays. Certains perpétuent ce style nostalgique d'une époque qui paraissait poétique et humaine ( bien que tous les vices y étaient au moins autant présents qu'aujourd'hui), les autres sont allés puiser dans les autres pays.

Je ne m'y connais pas assez, mais il y a certainement tous ces styles dans les pays de l'Est, peut-être moins développés que chez nous. Mais cette véritable identité musicale, qui je pense n'est pas un cliché comme le béret et la baguette de pain, prend valeur de parole. Enterrements, mariages, naissances, fête, desespoir, famille, tradition... cette musique accompagne chaque période de la vie. C'est ce qui ressort de "Gadjo Dilo".

A l'heure où un gars de l'Est est assimilé à un laveur de vitre, à un gosse mutilé pour faciliter la mendicité, à un pauvre qu'il faut renvoyer chez lui, ce genre de film ne peut être que bon, car il met en valeur la richesse de ce peuple trop sous-estimé. Et ce n'est pas parce qu'un Romain Duris, "avec ses grimaces mono-neurones", vient nous rappeler qu'on se trouve dans un film français, qu'il faut chercher à tout prix les quelques clichés du film. C'est un peu comme si à Saint-Pierre, un musicien d'un soir nous régalait par son talent et que l'on ne s'intéressait qu'au blaireau lambda à côté, parce qu'il fait partie du même décor.

Le cinéma c'est aussi ça, faire des concessions, faire un tri au sein même du film, car même la moindre scène réussie, aussi courte soit-elle, peut nous rendre indulgent face à la merde qui l'entoure. C'est ce qu'a réussit Gatlif pour moi.

Enfin bref, je sais pas pourquoi j'écris tout ça. "Gadjo Dilo" m'a ému par ses musiques, ses personnages atypiques, son atmosphère entrecoupée de Romains Duris. Peut-être suis-je un novice qui découvrira plus tard d'autres films dans le genre qui me feront mentir.

ravachol a dit…

En ce qui concerne le film en lui-même, je ne pense pas que Romain Duris soit une erreur. Certes, il est mauvais, délavé, fade, sans charisme, trop banal... je suis d'accord avec toi. Mais au final, cela permet de confronter deux cultures musicales et festives. Celle de la France, difficilement palpable, nostalgique quand à sa véritable identité, et celle des pays de l'Est, plus ancrée dans le peuple, plus quotidienne, moins prétentieuse.

Bien sûr ça fait un peu chier d'être représenté par un acteur qui trouve plus sa place dans les films de Klapisch, mais serions-nous réellement différents à sa place? Comment définis-tu la musique populaire française? Y trouves-tu un terreau fertile donnant lieu à un vrai partage intergénérationnelle? Sorti du bal musette et de l'accordéon, la chanson populaire française n'a au final que plagier les styles des autres pays. Certains perpétuent ce style nostalgique d'une époque qui paraissait poétique et humaine ( bien que tous les vices y étaient au moins autant présents qu'aujourd'hui), les autres sont allés puiser dans les autres pays.

Je ne m'y connais pas assez, mais il y a certainement tous ces styles dans les pays de l'Est, peut-être moins développés que chez nous. Mais cette véritable identité musicale, qui je pense n'est pas un cliché comme le béret et la baguette de pain, prend valeur de parole. Enterrements, mariages, naissances, fête, desespoir, famille, tradition... cette musique accompagne chaque période de la vie. C'est ce qui ressort de "Gadjo Dilo".

A l'heure où un gars de l'Est est assimilé à un laveur de vitre, à un gosse mutilé pour faciliter la mendicité, à un pauvre qu'il faut renvoyer chez lui, ce genre de film ne peut être que bon, car il met en valeur la richesse de ce peuple trop sous-estimé. Et ce n'est pas parce qu'un Romain Duris, "avec ses grimaces mono-neurones", vient nous rappeler qu'on se trouve dans un film français, qu'il faut chercher à tout prix les quelques clichés du film. C'est un peu comme si à Saint-Pierre, un musicien d'un soir nous régalait par son talent et que l'on ne s'intéressait qu'au blaireau lambda à côté, parce qu'il fait partie du même décor.

Le cinéma c'est aussi ça, faire des concessions, faire un tri au sein même du film, car même la moindre scène réussie, aussi courte soit-elle, peut nous rendre indulgent face à la merde qui l'entoure. C'est ce qu'a réussit Gatlif pour moi.

Enfin bref, je sais pas pourquoi j'écris tout ça. "Gadjo Dilo" m'a ému par ses musiques, ses personnages atypiques, son atmosphère entrecoupée de Romains Duris. Peut-être suis-je un novice qui découvrira plus tard d'autres films dans le genre qui me feront mentir.

ravachol a dit…

En ce qui concerne le film en lui-même, je ne pense pas que Romain Duris soit une erreur. Certes, il est mauvais, délavé, fade, sans charisme, trop banal... je suis d'accord avec toi. Mais au final, cela permet de confronter deux cultures musicales et festives. Celle de la France, difficilement palpable, nostalgique quand à sa véritable identité, et celle des pays de l'Est, plus ancrée dans le peuple, plus quotidienne, moins prétentieuse.

Bien sûr ça fait un peu chier d'être représenté par un acteur qui trouve plus sa place dans les films de Klapisch, mais serions-nous réellement différents à sa place? Comment définis-tu la musique populaire française? Y trouves-tu un terreau fertile donnant lieu à un vrai partage intergénérationnelle? Sorti du bal musette et de l'accordéon, la chanson populaire française n'a au final que plagier les styles des autres pays. Certains perpétuent ce style nostalgique d'une époque qui paraissait poétique et humaine ( bien que tous les vices y étaient au moins autant présents qu'aujourd'hui), les autres sont allés puiser dans les autres pays.

Je ne m'y connais pas assez, mais il y a certainement tous ces styles dans les pays de l'Est, peut-être moins développés que chez nous. Mais cette véritable identité musicale, qui je pense n'est pas un cliché comme le béret et la baguette de pain, prend valeur de parole. Enterrements, mariages, naissances, fête, desespoir, famille, tradition... cette musique accompagne chaque période de la vie. C'est ce qui ressort de "Gadjo Dilo".

A l'heure où un gars de l'Est est assimilé à un laveur de vitre, à un gosse mutilé pour faciliter la mendicité, à un pauvre qu'il faut renvoyer chez lui, ce genre de film ne peut être que bon, car il met en valeur la richesse de ce peuple trop sous-estimé. Et ce n'est pas parce qu'un Romain Duris, "avec ses grimaces mono-neurones", vient nous rappeler qu'on se trouve dans un film français, qu'il faut chercher à tout prix les quelques clichés du film. C'est un peu comme si à Saint-Pierre, un musicien d'un soir nous régalait par son talent et que l'on ne s'intéressait qu'au blaireau lambda à côté, parce qu'il fait partie du même décor.

Le cinéma c'est aussi ça, faire des concessions, faire un tri au sein même du film, car même la moindre scène réussie, aussi courte soit-elle, peut nous rendre indulgent face à la merde qui l'entoure. C'est ce qu'a réussit Gatlif pour moi.

Enfin bref, je sais pas pourquoi j'écris tout ça. "Gadjo Dilo" m'a ému par ses musiques, ses personnages atypiques, son atmosphère entrecoupée de Romains Duris. Peut-être suis-je un novice qui découvrira plus tard d'autres films dans le genre qui me feront mentir.

Chinaski a dit…

"Pour arriver à la scène avec les poules qui volent au-dessus de la maison qui crame, il faut se coltiner: l'acteur principal insupportable, le scènario bateau, les scènes ridicules... si en plus tu es passé à côté des bonnes scènes... tu avez donc rien à foutre à ce point là pour te faire chier pendant 1h30? où peut-être le film était un brin intéressant derrière toute cette avalanche de défauts."

Surtout parce que le film nous avait été recommandé, parce qu'on nous avait dit que la fin était "très émouvante", et qu'au bout d'un certain temps passé à le regarder tu te dis que tant qu'à faire, autant le finir...


Pour le reste, tu confonds Pays de l'Est et communauté tsigane, les communautés gitanes ou manouches en France sont sûrement aussi ancrées dans la musique que leurs homologues de l'Est.
L'herbe est toujours plus verte ailleurs.

"Le cinéma c'est aussi ça, faire des concessions, faire un tri au sein même du film, car même la moindre scène réussie, aussi courte soit-elle, peut nous rendre indulgent face à la merde qui l'entoure. C'est ce qu'a réussit Gatlif pour moi."

Tout est question de dosage, trop de merde tue la merde... euh, la moindre scène réussie je veux dire...

ravachol a dit…

OK pour l'ancrage musical des tziganes vivant ici. Mais pourquoi les Chinois, arabes ou ritals n'ont pas importé leur culture musicale? Pourquoi un film comme "Satantango", plus sociétale que communautaire, se passant en hongrie, pays où vivent des communautés de tziganes mais également des hongrois, nous offre-t-il des instants de musique semblables à ceux des tziganes? Cette culture propre est beaucoup plus forte dans les pays de l'est qu'en France (pour rester dans le cadre de "Gadjo Dilo"), elle revêt même l'identité foncière de ces peuples.

Peut-être que la France jouit-elle aussi d'une image de bal musette auprès des pays lointains, bien qu'on en soit loin à l'heure actuelle. Je vois mal une communauté de Français manifestant son identité musicale dans les pays de l'Est... pour le côté festif à la limite. Je n'ai pas l'impression que notre rapport à la musique soit tant intime et expressif que ça. On aime un style par affinité puis ensuite s'installe une intimité avec celle-ci. On ne né pas avec une tradition musicale dès le berceau. Les pays de l'Est me font penser à Cuba sur ce point: une musique populaire qui résiste au commerce et qui reste ancrée dans ses musiciens comme dans ses auditeurs.