mercredi 7 janvier 2009

Der Freie Wille, Matthias Glasner (2006)


Le « Libre Arbitre » ou l’art de pouvoir contrôler et décider de ses propres actes. Glasner construit son film sur cette notion ambiguë et abstraite en nous livrant un portrait grinçant et froid des pulsions qui se trouvent (peut-être) au fond de chacun d’entre nous.

Théo est animé de pulsions et ne peut s’empêcher de violer des femmes lorsque celles-ci l’émoustillent. Il est soigné dans un hôpital psychiatrique puis relâché pour bonne conduite. Dans un premier temps, un peu à la manière d’ « Orange Mécanique », Théo semble se comporter normalement. Il ressent toujours ses pulsions mais parvient à les canaliser par le travail qu’il réalise sur lui-même depuis la fin de son traitement médical. C’est alors qu’il rencontre Nettie, jeune femme abusée sexuellement par un père qui n’a pas respecté son rôle. Cette dernière s’éprend de Théo et parvient à former un couple quasiment normal avec lui. Faisant preuve de tolérance mais aussi de compassion envers le psychopathe, un semblant d’histoire d’amour naît entre les deux acolytes. Le besoin de réconfort et la solitude de Nettie viennent renforcer le sentiment naissant de normalité chez Théo. Ce dernier se sent à l’aise et réussit à vaincre sa peur des femmes, l’espace d’un instant, avant d’être à nouveau victime de ses pulsions antérieures…

Bien qu’impartial dans sa forme, « Der Freie Wille » est loin de l’être dans son fond même. Les paysages, morose et immuables, semblent aller dans le sens de la tragédie vécue par Théo. On pourrait penser que le réalisateur a voulu fondre le personnage dans une ambiance glauque afin de l’y confondre et d’en faire un cas particulier parmi d’autre sans réflexion profonde et sans parti pris. De même, toujours par rapport à la forme, on serait tenter d’évoquer la violence gratuite, souvent énoncer par les critiques. La première scène de viol, âpre et malsaine, peut paraître vide de sens et exagérée, mais présente un réalisme extraordinaire dans l’ambiance qu’elle véhicule. Les autres scènes de violence, pas si nombreuses que ça au final, vont également dans ce sens là et font énormément penser à l’atmosphère que l’on rencontre dans les films de Gaspard Noé. Au niveau de la forme donc, de l’apparence extérieure et donc du regard d’autrui, Théo est un être violent qui ne mérite pas sa place dans la société.
Mais le point fort du film de Glasner, c’est ce côté intimiste qui s’installe dès les premières minutes. Caméra au corps, le réalisateur tente de pénétrer au plus profond des personnages afin d’essayer de comprendre un problème qui apparaît sans solution. Plus on rentre dans le personnage de Théo, plus le sentiment de compassion nous envahit mais aussi plus on sombre dans l’incompréhension la plus totale. C’est là le point fort de ce film : arriver à pouvoir détacher le personnage de ses pulsions aux yeux du spectateur, en confronter les conséquences auprès de l’environnement extérieur et entamer une réflexion sans fin sur la place des marginaux mentaux dans la société.
Ce côté intimiste est également présent dans les émotions des personnages qui sont volontairement amplifiées afin de refléter une souffrance extrême et profonde. Que ce soit des gémissements, des pleurs ou mêmes des respirations, elles apparaissent aussi douloureuses que les cris des victimes de Théo et viennent atténuer la limite initialement bien tranchée entre le bourreau et ses victimes.

Au final, un film très réussi dans sa construction, scénaristique comme technique, mais aussi dans l’atmosphère qui plonge le spectateur dans un univers de réflexion, de douceur et de bestialité à la fois. Y a-t-il une morale ? Là n’est pas le but du réalisateur, ni de la réflexion auquel on est soumis. Les prestations des deux personnages principaux (ressemblant étrangement à Klaus Kinski et Charlotte Gainsbourg) sont vraiment excellentes et sans concession. Un film qu’il faut avoir vu avant de mourir…

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