dimanche 21 mars 2010

Baraka, Ron Fricke (1992)


Que dire lorsque la seule image confère à l'Universel, lorsque le silence se met à parler pour délivrer des messages plus déchirants les uns que les autres, lorsque la simplicité engendre la beauté et l'harmonie? On reste alors muet tant l'on se sent en osmose avec cette succession de séquences à l'esthétique parfaite.

"Baraka" est certainement le documentaire le plus abouti quant à la description de la condition humaine. Décrivant l'Humanité comme un Eternel Recommencement, Ron Fricke construit ce que l'on sait déjà et nous fait ouvrir les yeux grâce à des comparaisons judicieuses peu avouables.
Le Temps est ici une simple donnée qui revêt différents rythmes. Ainsi les paysages luxuriants que l'on est amené à voir sont filmés en accéleré afin de montrer qu'il existe une beauté impérissable, inatteignable par l'Homme mais pourtant indissociable de lui. Il en est de même pour les séquences traitant de nos sociétés modernes. Semblables à ces poussins qui sont embarqués sur des chaînes automatisées et dont l'issue est déjà prédéfinie, nous évoluons selon un rite commercial, troquant nos services contre des besoins superflus. Il en découle un déplacement répétitif et inutile laissant les plus faibles dans une misère absolue et intemporelle. Cependant, lorsque le réalisateur renoue avec notre unité de temps, c'est pour filmer des rituels ancestraux ou des visages de personnes pieuses. L'Homme ne serait-il heureux que dans la croyance et l'innocence? Telle est la problématique que pose "Baraka". A une vie anarchique et illusoire vient s'opposer une vie pieuse et cadrée, dénuée de tout matérialisme.

La destruction est également un des thèmes forts du documentaire. Filmant avec passion les vestiges de civilisations ancestrales, le réalisateur nous fait avouer que le Beau, l'Abouti et le Luxuriant ne sont qu'éphémères, une sorte de transition entre la Grandeur et le retour à l'animalité. L'Humanité prend alors cet aspect cyclique à nos yeux, recherchant à nouveau le Beau, recommençant les mêmes erreurs que le passé, s'évertuant à se mordre la queue.

"Baraka" est un documentaire optimiste car il met en valeur une beauté planètaire qui semble immuable, inatteignable par l'Homme. "Baraka" est un documentaire pessimiste car il montre l'Homme et sa civilisation comme une entité perissable qui renaît sans cesse de ses cendres afin de disparaître à nouveau de la même façon. "Baraka" est une belle leçon de cinéma qui tourne le dos à l'Art explicatif pour bousculer le ressenti du spectateur. Un documentaire incontournable et culte.

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