Quelle est la part foncière de l'Homme? Comment se comporte la classe moyenne japonaise lorsqu'elle tente de percer le mystère de la vie? Que devient un homme lorsqu'il est emporté par le tourbillon de ses pulsions? Autant de questions que se pose le marquis de Sade des temps modernes.
Sado-masochisme, influence de la sexualité et déchéance irréversible semblent être les trois thèmes phares de l'auteur. Pourtant Ryu est impudique à outrance, il se met à nu devant le lecteur, lui dévoile ses sentiments, ce qu'il admire chez l'Homme. Toute cette violence ambiante, ce retour à la vie primitive grimé par un matérialisme aveuglant ou encore cette plongée abyssale dans la drogue ne reflètent que les désillusions vécues par l'écrivain. Ryu aime la musique (1969, Ecstasy, Melancholia, Thanatos), les cultures ancestrales ( sa trilogie) et surtout l'âme humaine dans laquelle il y voit une richesse incroyable qui se concrétise par la seule misère sexuelle et morale.
A l'instar de Bukowski, Ryu est un écrivain qu'il faut comprendre pour pouvoir apprécier son oeuvre. Certes, "Les Bébés de la Consigne Automatique", un de ses chefs-d'oeuvres, est captivant dès les premières lignes et l'anonymat nuirait en rien à la qualité du récit. Cependant dès que l'on aborde sa trilogie,"Lignes" ou "parasites", on remarque d'emblée un travail méditatif colossal, une réflexion poussée sur des thèmes primaires. On se demande alors pourquoi l'auteur se donne tant de mal s'il ne fait que vomir son dégoût de l'Humanité à chaque mot. On pense alors à Cioran, mais on oublie vite cette comparaison tant le récit de Ryu s'en détache par la dualité de ses personnages.
Tout le talent de Ryu réside dans sa prose et la construction anarchique de ses récits. Volontairement dérisoires, ses phrases reflètent l'animalité des Hommes qui s'obstinent à se camoufler derrière une vitrine sale qu'ils tentent de conserver en l'état afin de ne pas aperçevoir leur reflet. Pourtant ce qu'ils vivent n'est que l'image qu'ils n'osent regarder en face. L'écrivain, par sa prose, passe donc un coup de chiffon sur le miroir et reconcilie l'image et son sujet. Et c'est parti pour une avalanche de vices les plus abjectes, une recherche de la jouissance absolue par la drogue et le sexe qui met en scène des âmes déchues car lucides de leur sort. La construction désordonnée vient enfoncer le clou et faire émerger une naïveté chez ses personnages. On se sent alors étranger au récit afin de mieux l'observer et on posséde un recul en même temps que la connaissance des évènements. Outre "Les Bébés de la Consigne Automatique" et "1969", les romans de Ryu ne se vivent pas, ils s'observent et remettent en question chaque acte de notre propre vie tant les images extrêmes qu'ils nous infligent nous accompagnent une fois le livre refermé.
Enfin ce qu'il y a de drôle chez Ryu, c'est qu'il nous fait ressentir ce qu'il n'écrit pas. En dehors des évènements qu'il relate, on se pose des questions sur les pages qu'il a laissé blanches. Considéré à tort comme le chantre des générations désabusées, il va bien au-delà d'une simple description et y ajoute un côté mystique qui déclenche l'imcompréhension et donc la réflexion du lecteur.
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