vendredi 19 septembre 2008

Shoah, Claude Lanzmann (1985)

En 1956, Alain Resnais tourne le célèbre "Nuit et Brouillard", s'appuyant uniquement sur des images d'archives quasiment insoutenables. Près de trente ans plus tard, Claude Lanzmann décide de réaliser une oeuvre plus historienne mais aussi plus philosophique sur cette tragédie. Et pour cause, pendant près de neuf heures trente, on observe les visages parfois traumatisés, parfois impassibles, des rescapés (ou bourreaux) souvent dépassés par les évènements. La plupart en ont été acteurs malgré eux et porteront à jamais ce poids en eux, d'autres ont agit en bourreaux et tentent de minimiser les actes qu'ils ont commis en jouant la carte " on n'était pas au courant que ça se passait comme ça" et enfin des historiens tentent des approches plus générales pour replacer ces visages dans leur contexte.
La particularité de "Shoah", c'est qu'il ne comporte aucune image d'archives, tout est filmé dans les années 80 et c'est peut-être la force majeure de l'oeuvre: observer l'impact de ce génocide sur des personnes qui nous sont contemporaines en filmant des rencontres que l'on pourrait réaliser soi-même.
Mais attention, il ne faut pas non plus encensé ce documentaire. C'est pas parce qu'il traite d'un sujet tabou et apparemment immuable qu'il est parfait. Historiquement, c'est quasiment parfait, il faut le reconnaître, mais pour les spectateurs, et en particulier les plus jeunes, il y a des passages franchement chiants et puis je trouve que Claude Lanzmann fume trop tout au long de son escapade. Que vont retenir les jeunes de cette expérience??
Au final, sans faire le rabat-joie, il faut avouer que "Shoah" est à voir. Il ne faut pas s'attendre à un coup de poing dans la gueule sinon on en ressortira en ayant encore la dalle. Il faut plutôt se laisser aller vers ce néant où tout s'arrête: la vie des survivants qui sont déjà morts, les paysages laissant apparaître les restes des camps qui paraîssent figés à jamais et surtout le temps qui n'est plus du tout perceptible (sauf quand on regarde sa montre pendant les quelques lenteurs...) à l'intérieur comme à l'extérieur du film.

P.S: Pour ma part, les 1h30 de "Nuit et brouillard" m'apparaîssent bien plus efficaces que ces 9h30, et n'est-ce pas le but des documentaires traitant de la Shoah?? Enfin je dis ça, je dis rien...

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